Les deux sets programmés par Jazzdor
jeudi 12, outre leur réussites, offrent quelques bribes de réponses
à la question de l'héritage dans le jazz actuel.
Tout juste débarqués du train en
retard, qui agitera la soirée culturelle strasbourgeoise du jour,
Anne Paceo et Matteo Bortone rejoignent le piano de Christophe Imbs
pour l'entame du set au CEAAC. Pas complexés, les trois Stooges
lancent le concert de jeudi avec Tuesday et mettent les pieds
d'emblée dans la puissance pop. Sans doute Christophe Imbs a-t-il
entendu The Bad Plus écoutant Nirvana ou d'autres power trios de
jazz testiculé. Rack d'effets en bandoulière, Imbs sulfate les
politesses du piano forte quand Bortone et Paceo martèlent les
préliminaires. Motif rythmique répété jusqu'à la moelle,
sonorités électroniques en arrière-plan, le cadrage de Tuesday
est serré et annonce un set énergique et joueur. Mémorial,
morceau atmosphérique prenant le relais, lévite avec patience sur
les drones tombés à la fois de l'avant-garde US des 70'S et du
meilleur de l'electro minimale actuelle, à peine bousculée par
quelques accords plaqués à la française mais en mode
reverse.
Dans la musique du trio, remuent donc
tout ce qu'un jazz d'aujourd'hui a pu entendre ou croiser sur disques
ou en live. Ici, on sent la quête énergique des spirales du rock
venir flirter avec l'ouverture et la rupture chères au jazzman,
depuis que le jazz est jazz.
Nectarine War, où
la main droite de Imbs livre quelques précis motifs très vifs,
vient compléter la thèse. Modal, lyrique sans crainte
d'être mélodique, ce morceau appartient dans doute aux belles
choses, sans qu'on puisse l'enfermer dans la joliesse un peu mièvre.
Le planant Music By et
le flambeur Sharp,
devenu Shark par les
joies polyglottes, ajoutent que la musique du trio, dans ses
perspectives, échangent des liens souterrains avec la littérature,
le secret indicible de l'écriture, peut-être. Sans être tout à
fait jésuites, les trois compères ne lâchent pas facilement leurs
ornements et on sent Christophe Imbs, malgré les ruades de Paceo,
encore à peine prompt à quitter ses retranchements. Secret
indicible, disions-nous.
Énergie, ruptures rythmiques, mélodie.
Ces ingrédients fréquents dans la jeune génération sont remués
par le drumming souriant et alerte d'Anne paceo, habituée des
remous scéniques aux côtés de Jeanne Added, entre autres. Le drive
de Paceo, qui vient sans cesse perforer plus que soutenir les
empilements de Bortone et d'Imbs, fins bretteurs, est très excitant
après les pénibles galipettes d'Edward Perraud vues hier à Nevers.
Badneighbour
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